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13 novembre 2016

A propos des discussions sur les sondages

A bien écouter les médias traditionnels et à lire la plupart des textes sur les réseaux sociaux, il semblerait que les sondages d’opinions sont devenus, en une journée (entre le 8 et le 9 novembre 2016), une méthode scientifique désuète et dépourvue de toute sa splendeur d’antan. Beaucoup des analystes affirment, à tort ou à raison, que Donald Trump a fait mentir les 300 sondages d’opinions qui ont tous donné Hilary Clinton gagnante des élections américaines.
Ce n’est pas la première fois que les résultats des sondages électoraux diffèrent des résultats des votes. C’était aussi le cas pour le Brexit (référendum consultatif réalisé en Grande Bretagne sur la sortie dans l’Union Européenne). Alors, comment expliquer cette différence entre les résultats des sondages et la réalité ? Les sondages seraient-ils devenus réellement désuets dans la compréhension de la réalité électorale mondiale ?
Ce présent article est une analyse des différentes limites des sondages d’opinions expliquant le pourquoi de ces différences entre les résultats et proposant des pistes de solution.

Sondage et sondage d’opinion

Tout d’abord, c’est quoi un sondage ?
Le sondage est considéré comme une méthode statistique ayant pour but de mesurer des proportions d’une ou de différentes caractéristiques d'une population à partir de l'étude d'un échantillon de celle-ci (seulement une partie de la population). Ici, on entend par population l’ensemble des éléments sur lesquels les caractéristiques seront mesurées.
En marketing et dans les élections, le sondage d’opinion constitue une application des techniques de sondages à une population humaine afin de déterminer les préférences des individus de cette population en étudiant un échantillon de cette dernière.

Les limites inhérentes à tout sondage d’opinions

Les sondages d’opinions constituent une méthode scientifique très utilisée par beaucoup d’organismes et d’institutions. Cette méthode leur fournit beaucoup de solutions à des problèmes dont ils faisaient face comme comprendre les désirs des consommateurs en Marketing ou comprendre les intentions de vote des potentiels électeurs dans le cadre de la réalisation d’une élection.
Aussi utiles que puisse être un sondage d’opinion, il regorge de limites qui méritent d’être pris en compte dans leurs analyses. Les limites qui sont inhérentes à tous les sondages d’opinions sont :

1-  Echantillonnage, niveau de confiance et marge d’erreur

Le sondage utilise un échantillon (une partie) de la population cible pour mesurer les opinions ou préférences de cette partie. Les opinions mesurées sont alors extrapolées à toute la population sous certaines conditions. Ces conditions sont celles qui ont été prises en compte dans le calcul de l’échantillon à interviewer.
L’une de ces conditions est le niveau de confiance choisi. Etant réalisé sur seulement une partie de la population, il ne sera pas possible de savoir avec une confiance de 100% si les opinions mesurées correspondent aux opinions de la population. Le niveau de confiance est cet élément qui permet d’inclure dans le sondage la probabilité de se tromper dans le choix de l’échantillon.
La plupart des sondages utilisent un niveau de confiance de 95% donc un risque de se tromper de 5%. Ce qui signifie qu’en faisant le choix aléatoire de l’échantillon, en moyenne 5 fois sur 100 (en supposant que 100 échantillons aléatoires ont été tirés), les opinions mesurées peuvent ne pas correspondre aux opinions de la population. Quand l’échantillon est bien choisi c'est-à-dire que les opinions mesurées correspondent aux opinions de la population, il est dit représentatif de la population. Dans le cas contraire, il n’est pas représentatif.
La marge d’erreur est un autre paramètre qui est utilisé dans le calcul de l’échantillon. Et cette marge d’erreur permet de construire des intervalles dans lesquelles devraient se trouver le vrai pourcentage des opinions de la population si l’échantillon est représentatif. Il est donc primordial d’utiliser les intervalles de confiance dans l’analyse des opinions car ils permettent de cerner dans quelle fourchette devrait se trouver le pourcentage réel des opinions.
Par exemple, pour un sondage électoral avec une marge d’erreur de 3% où le candidat X a obtenu 46% des intentions de vote et le candidat Y 44.5%. Les intentions de votes réels de la population devraient se situer entre 43% et 49% pour le candidat X et entre 41.5% et 47.5% pour le candidat Y si l’échantillon est représentatif. Dans un cas pareil, il ne serait nullement étonnant que le candidat Y obtienne plus de voix que le candidat X car les vraies intentions de vote peuvent être de 44% pour le candidat X et 45% pour le candidat Y (compris dans les intervalles de confiance).
Donc l’analyse des pourcentages (estimation ponctuelle) uniquement n’est pas complète et ne permet pas toujours de savoir avec exactitude qui a réellement plus d’intentions de votes (surtout quand l’écart entre les candidats n’est pas grand).

2-  Hypothèse de vérité

L’un des fondements des sondages d’opinions résident dans le modèle béhavioriste supposant que les individus de l’échantillon qui seront interviewés vous diront la vérité sur leurs opinions. Or, il est tout à fait possible que, pour des raisons inconnues, certains des interviewés ne vous révèlent pas leurs réelles opinions ou que les opinions révélées lors d’un sondage changent en fonction des informations reçues par l’individu après l’interview. Il est même possible que choisir entre deux ou plusieurs candidats ne tient qu’à un fil pour l’interviewé.
Dans un cas pareil, la mesure des opinions de l’échantillon peut ne pas refléter les opinions de la population au moment des votes.

3-  Temps de validité

Les enquêtes d’opinions présentent les résultats des opinions collectées sur l’échantillon pendant la période de collecte. C’est donc une photo ou un instantané des opinions des interviewés pour une période spécifique. Les sondages sont donc valides uniquement pour la période de collecte des informations.
Beaucoup de facteurs peuvent modifier les opinions et les préférences des interviewés entre la période de réalisation d’un sondage électoral et les élections.  C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les candidats intelligents utilisent les résultats des sondages électoraux pour mieux comprendre leurs forces et leurs faiblesses et essayer de se renforcer dans les lieux où ils sont faibles.
Dans une pareille dynamique, il n’est pas étonnant de voir des candidats faire mentir les sondages. Car, premièrement, les sondages réalisés avant les élections n’ont aucune validité le jour des élections en raison du caractère changeant des opinions des humains ; et deuxièmement, les résultats sont utilisés pour modifier les opinions des individus de la population.

Vers des résultats plus précis

Les limites inhérentes aux sondages et le caractère changeant des opinions des humains rendent plus difficiles la compréhension des préférences de la population. De ce fait, des études statistiques plus approfondies méritent d’être réalisées en utilisant des méthodes quantitatives et qualitatives afin de mieux cerner les préférences de la population cible.
Il ne faut pas cesser d’utiliser les techniques de sondages dans la compréhension des opinions comme dans le cas des sondages électoraux. Par contre, il faut analyser les résultats en fonction de la marge d’erreur utilisée dans le cadre du calcul des échantillons et il faut relativiser les résultats sachant que les opinions et préférences des individus sont changeantes.
Notez bien qu’un sondage électoral ne dit pas quel sera le résultat des élections ! Au contraire, il renseigne sur les intentions de vote des électeurs à un moment précis et sert d’outil d’aide à la décision stratégique en vue de changer les opinions.
Les sondages d’opinions ne tombent pas en désuétude. C’est la compréhension et les attentes du monde des résultats des sondages qui doivent évoluer !!!


      Auteur : Pierre Philippe Wilson REGISTE
Contact : pentagoneconsultinggroup@gmail.com

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